
Il est de notoriété publique que je ne lis pratiquement jamais de BD. Mais il m’a été impossible de résister au mauvais esprit de Salomé Lahoche, et j’aurais été perdante à passer à côté d’Ernestine.
Ernestine a 9 ans, elle déteste les enfants de son âge, fume, boit et joue au poker en ligne. Quand on la réprimande, elle n’a aucun mal à fuguer à Cuba pendant une semaine, par exemple. Elle peut extorquer de l’argent aux vieux, traumatiser des gosses en leur parlant de l’actionisme viennois ou partager ses crises existentielles avec la baby-sitter. Sa mère pense qu’elle est démoniaque. Il faut dire que sa mère est au bout du roll’s. Que son père est fuyant et son frère débile. Ernestine évolue dans une famille pire que dysfonctionnelle, et on se demande, entre possession ou mécanisme de protection, ce qui la constitue.
C’est fort de réussir à faire une BD qui vous donne envie de pleurer de rire et où tout est à l’économie dans les dialogues. Tout est utile, tout est drôle (ou déprimant et pathétique), il n’y a rien en trop. Chaque histoire est introduite par une grande planche où la créativité de l’illustratrice est sans limite. Les personnages secondaires sont bien pensés (Corentin nous régale par ses sorties improbables) et une fois terminée, on a tout de suite envie de la relire avec un autre prisme. Car il faut dire que la fin nous cueille un peu, et c’est là le génie de l’autrice. On peut rire, on peut faire de l’humour noir, mais a posteriori, est-ce que tout était si drôle et n’avons nous pas été un peu cruels ?
Bref, n’attendez plus, c’est formidable, c’est hilarant, c’est Ernestine.
Ernestine. Salomé Lahoche. Même pas mal. 2024.
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