Baumgartner, de Paul Auster

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S.T. Baumgartner est un professeur de philosophie à la retraite. Dix ans plus tôt, son épouse Anna Blume est décédée et désormais sa vie se résume à commander des livres sur internet, en écrire, se retrouver dans diverses pièces de sa maison en se demandant ce qu’il était venu y faire. Et puis il y a les souvenirs, dont il faudrait savoir quoi faire, et qui assaillent notre protagoniste à n’importe quelle heure du jour et de la nuit.

Baumgartner est peut-être le dernier roman de Paul Auster, l’avenir nous le dira. Mais on ne peut qu’être frappé.e par son caractère vespéral. Truffé de clins d’œil autobiographiques (une mère nommée Ruth Auster, une épouse écrivaine et poétesse, un personnage né à Newark, comme l’auteur…), ce roman gigogne vient nous placer face à la plus indéniable des certitudes : la fin de la vie.

On oscille entre le récit principal, des textes écrits par Anna Blume, d’autres écrits par Baumgartner, des souvenirs de jeunesse… Sans jamais perdre de sa cohérence, le récit se fragmente comme sait le faire la mémoire, virevoltant d’une idée à une autre, effectuant des voyages entre passé et présent, entre la nostalgie douce de ce qui fut et la pulsion de vie, potentiellement anxiogène, de ce qui peut encore advenir et que l’on ne voudrait pas manquer.

C’est un texte court qui aurait la matière pour être trois fois plus long, et pourtant à aucun moment on ne se sent frustré.e, tant le décor, le personnage et l’intrigue sont esquissés précisément et en peu de mots. Au-delà du texte d’Auster se déroule un univers où projeter notre imagination, preuve que la densité peut être contenue dans la concision. Reste à savoir si l’on souhaite superposer Baumgartner et Auster, où les voir sur deux plans différents, personnellement j’ai imaginé Sy, notre protagoniste avec un grand regard cerné immédiatement reconnaissable. N’ayant lu jusqu’ici que les Brooklyn Follies, lors de mon année de terminale, la beauté et la douceur mélancolique de Baumgartner, teintées parfois d’humour, m’ont donné envie de me plonger plus avant dans l’œuvre d’Auster.

Baumgartner. Paul Auster. Traduit de l’anglais (États-Unis) par Anne-Laure Tissot. Actes Sud. 2024. 200p.

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