Archives du 18/05/2024

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Lorsque l’on pose ses yeux sur les mots de quelqu’un d’autre, mais des mots qui disent si bien sa propre histoire, il nous vient un vertige. Presque par hasard j’ai ouvert le roman de Madeleine Grey, et frénétiquement je me suis mise à corner des pages, à envoyer des passages entiers par messages à des amies, prise d’une excitation proche de la nausée de voir, imprimés devant moi, les mots qui attendaient depuis deux ans et demi au fond de moi. J’ai reçu des messages de femmes qui s’y retrouvaient, et alors j’ai eu pour la première fois le sentiment d’être moins seule. Vivre dans le secret isole. Se glisser dans les marges de la vie de l’autre condamne à la honte, au silence et à la solitude. Et lorsque tout s’arrête, le poids de notre faute suffit à anihiler le bien fondé de notre chagrin. Il n’y a pas de droit au malheur pour les maîtresses. Elles l’ont bien cherché, elles n’auraient pas dû, qui les plaindra, celles que les circonstances n’excusent jamais? Il y a une consolation ainsi que la montée d’un petit désespoir à se rendre compte que ce que l’on prenait pour unique et inédit n’était en fait que la petite banalité de la vie adultérine. Les mêmes phrases, les mêmes excuses les mêmes prétextes les mêmes bassesses et petites vulgarités. Le même flamboiement, le même espoir, le même anéantissement du cœur car tout se finit toujours pareil c’est écrit, ils ne changent pas. On pense être celle qui mais les romans nous apprennent depuis la nuit des temps qu’il n’y a pas d’élue. Seulement des femmes qui se croient seules, à porter le secret, la faute et la honte, alors qu’elles sont des cohortes. C’était doux, de se lire entre femmes cachées, femmes trompées, de se dire que l’on peut retisser les liens dont la lâcheté des uns nous a privées, qu’après la vie de miettes on se reconnaît. On a appris, on ne se contentera plus des heures fugitives, on s’inventera des amours et des joies à notre mesure, en plein jour, immenses et bruyantes.

On écoute quoi aujourd’hui ?

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