
Georgene a conservé ses souvenirs ainsi que des indices sur la disparition de sa sœur. Le matin du 11 avril 1991, Marguerite Fulmer, artiste et professeur, n’est jamais arrivée à l’université. Georgene est la dernière personne de la famille à l’avoir vue. Mais si elle compte résoudre le mystère de cette disparition, elle va sciemment dissimuler des éléments à la police, car tout ceci ne les regarde pas.
En 48 chapitres, Joyce Carol Oates dresse le portrait d’une jeune femme talentueuse et brillante, mais également, en creux, celui de sa sœur plus réservée, au rapport au monde complexe. Georgene s’arroge le droit de chapeauter l’enquête, pour préserver leur père, mais vit dans une construction faite de ses projections, névroses et angoisses. En résulte un rapport au réel distordu, mettant le lecteur dans une position très inconfortable.
JCO (ma reine) est incomparable lorsqu’il s’agit de créer des atmosphères pesantes, d’où le malaise suinte tranquillement. Au travers de cette disparition, elle vient questionner le statut des femmes artistes, puisque l’image de Marguerite sera exploitée par un peintre, la dépossédant de son statut d’artiste, pour en faire le sujet de tableaux dérangeants. Elle possédait une agentivité, mais son absence au monde la transforme instantanément en chair meurtrie.
Elle tricote une relation entre sœurs qui tient de la fascination, de la détestation autant que d’une forme d’amour déformé. Elle nous entraîne sur de fausses pistes, se joue de nous et de nos propres interprétations. Et finalement, elle nous jette au visage une résolution qui ne fait que crier que peu importe, le sort des femmes est sans intérêt, leur existence importe moins que ce qu’elles représentent. C’est, bien évidemment, brillant.
48 indices sur la disparition de ma sœur. Joyce Carol Oates. Traduit de l’anglais (États-Unis) par Christine Auché. Philippe Rey. 2024. 280p.
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