Archives du 22/09/2024

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Depuis combien de temps suis-je tarie de mes mots ? Je faisais le compte hier, j’écoutais J. et ses phrases qui remuent, sa voix poétique qui faisait écho au vide de la mienne. C’est une affaire d’espace, la chambre à soi s’exerce dans la tête et je n’y trouve aucun refuge. Je n’ai pas le temps, je ne veux pas l’avoir et j’ai jeté la clef. Toute à mes engagements, à la vie qui se joue hors de moi, je fais taire les murmures qui m’habitent. Plus tard, plus tard, et mon flux de conscience n’existe plus que pour me tancer. J’éloigne la tendresse chèrement acquise, je me discipline et, petite bête rétive, je n’y arrive pas. Encombrée de tout ce que j’accumule, je fais grossir un fleuve en moi, j’y dérive. L’automne me serre de ses gros bras humides et doux, j’ai le goût de l’humus dans la bouche, mais je m’éloigne de mes rivages. S’en vient parfois la peur de me revenir et de devoir charrier ce que j’ai accumulé dans mes espaces liminaires, un chapelet de petits chagrins jamais purgés. Je n’écris plus, serrée au cœur par une dureté nouvelle, je perds en souplesse, je me manie moins bien. Je me connaissais rigide, je me découvre à l’étroit, dans le temps et au-dedans. Je vis de dates à cocher, de calendriers, d’anticipation logistique, les listes de tâches ont grignoté la poésie, les larmes et le silence, qui me nourrissent. Ce matin, dans mes contours de territoire délaissé, j’attends que quelque chose repousse.

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