
Comme un coup d’accélérateur dans la Pile à Lire en ce mois de novembre, on n’est pas encore arrivé à la fin et j’ai déjà lu 12 livres. Il y en a dont je veux spécifiquement vous parler, d’autres que j’ai aimé fort mais je sais que je n’aurai pas le temps d’en faire un article entier. Alors un petit florilège de bien, de moins bien, de chaotique neutre1. (Ah, et j’ai conscience que ma photo est floue, je ne sais pas ce qu’a fait mon appareil, et j’ai clairement eu la flemme de la refaire. Portez plainte si ça vous dérange.)
- L’institut du nouveau lendemain, Chloé Vollmer-Lo. Nathan. 2025.
J’ai eu la chance de rencontrer cet amour de Chloé lors du mariage de ma meilleure amie. Elle était la photographe et m’a parlé de son projet de roman. J’étais donc en joie de recevoir le premier tome de sa série « Les visages de feu » et de plonger au coeur de l’Institut du Nouveau Lendemain. Dans un monde où l’Effondrement semble avoir eu lieu, il existe un endroit, pensionnat, orphelinat, qui accueille les jeunes filles et leur promet un avenir, brillant pour les meilleures d’entre elles. Système de classement, matricules, contrôle des corps et des esprits, la vie est sécurisée à l’Institut, mais est-elle pour autant heureuse ? Luce ne cesse de se remémorer la vie à l’extérieur, jusqu’à être rétrogradée et attiser son envie de révolution. J’ai dévoré ce roman pour grands ados (à partir de 16 ans à mon avis, car certains passages sont très rudes, on meurt pour de vrai, les VSS sont présentes, bref, c’est pas un pique-nique, c’est de la vraie dystopie) et j’avais envie de connaître la suite dès la dernière page refermée. J’ai trouvé son approche psychologique des personnages assez fine, on erre dans la zone grise et complexe de l’humanité. On peut se tromper sur les gens, on peut changer d’avis, on peut puiser en soi divers ressources insoupçonnées. Et le style de de Chloé, littéraire, précis, jamais trop ni trop peu, est parfait.
- Margarettown, Gabrielle Zevin. Traduit par Aurore Guitry. Fleuve Editions, 2025.
Ma première incursion dans la rentrée littéraire de janvier, avec le premier roman de Gabrielle Zevin, autrice de Demain et demain et demain et coup de coeur avec lequel je vous ai saoulé pendant un temps certain. J’avais hâte de découvrir la vie de Margaret Towne, jeune femme que rencontre le narrateur à l’université et qui semble abriter plusieurs versions d’elle-même, d’âges et de personnalités différents. Construit comme une sorte de conte s’affranchissant de la réalité à différents endroits, mais aussi réflexion sur la fiction elle-même, son rôle, les libertés que l’on peut prendre avec les faits lorsque l’on veut raconter une histoire et faire passer un message, ce roman ne m’a malheureusement pas convaincue. Je l’ai terminé car il est très court, mais je n’ai pas retrouvé le ravissement de ma découverte de Gabrielle Zevin. Je mets cela sur le compte du premier roman, parfois génial, mais souvent assez inabouti par rapport aux oeuvres produites par les auteurices a posteriori.
- Model Home, Rivers Solomon. Traduit par Francis Guévremont. Aux Forges de Vulcain, 2025.
Ce roman était parfait à lire lors de la mise en avant à la librairie de la thématique des maisons hantées. la Booktubeuse Margorito en avait dit grand bien alors j’avais hâte de le découvrir. Je n’ai pas forcément eu le même coup de coeur qu’elle, mais j’ai trouvé que c’était un bon roman, bien ficelé et que les sujets abordés étaient bien traités. Le personnage principal quitte l’Angleterre où iel vit avec sa fille pour retourner voir ses parents après d’inquiétants sms de sa mère. Lors de son arrivée, ses parents sont décédés dans la maison et commence alors un retour en arrière, avec ses soeurs, dans l’histoire de la maison, possiblement hantée, qui leur a fait tant de mal. Évidemment la maison hantée est une excellente métaphore des violences intra ou extra familiales et permet de personnifier et donner du corps à une emprise psychologique. Je n’ai rien à reprocher à ce roman, je crois qu’en ce moment j’ai juste du mal à avoir des coups de coeur.
- Parthenia, Pauline Gonthier. Les Léonides, 2025.
Encore un roman de la rentrée littéraire dévoré en deux jours. Ici, deux points de vue que beaucoup de choses semblent opposer, quoique … D’un côté, Baptiste, jeune homme végétant dans l’appartement de son père, passant beaucoup de temps à jouer aux jeux vidéos et ruminant sa rupture en consommant de plus en plus de contenu masculiniste. De l’autre, Léa, assistante parlementaire d’un homme politique d’extrême droite, chargée de la partie communication et stratégie en ligne de sa campagne pour les présidentielles. Portée par son ambition et son amour des jeux vidéos, elle passe beaucoup de temps sur Parthenia, un jeu à l’esthétique rappelant l’empire romain, où la discipline, la rigueur, l’ordre et la hiérarchie priment et séduisent de nombreux jeunes hommes. C’est là qu’elle compte recruter, c’est là que traîne Baptiste. C’est un roman très bien construit qui peut heurter par son contenu masculiniste très frontal. Cela fonctionne bien, on est directement mis en relation avec les articles, forums, modes de pensée des incels et ça fait froid dans le dos. J’ai aimé la résolution, juste cathartique comme il faut, sans tomber dans trop d’écueils clichés.
- Les enfants sont calmes, Kevin Wilson. Traduit par Christine Barbaste.J’ai Lu, 2024
Lilian aurait pu prétendre à une vie assez brillante si une bête erreur de parcours au lycée (rappel que les riches s’en sortiront toujours mieux) ne l’avait pas condamnée à rester dans son milieu. C’est donc une surprise d’avoir des nouvelles de son amie Madison, bien plus privilégiée qu’elle et mariée avec un sénateur, pour lui proposer un emploi. Lilian est chargée de s’occuper des jumeaux du premier mariage du sénateur. Un travail classique de gouvernante, si ce n’est que les enfants ont une petite particularité un peu gênante : ils prennent feu. Lilian doit donc apprivoiser les petites torches humaines et organiser un quotidien qui évite toute velléité d’enflammement. J’ai trouvé ce roman assez drôle, un peu caustique, mais également très tendre sur la question de la parentalité parfois imprévue. Quelles relations peuvent se tisser entre une adulte et des enfants que rien ne prédestinait à se rencontrer ? L’amour est-il obligatoirement lié aux liens du sang ?
- L’homme est une fiction, Carmela Chergui. Tusitala, 2025.
Dans ce court et étonnant texte, Carmela Chergui nous livre une histoire assez personnelle, celle d’une (en)quête la menant sur les traces d’un auteur de bande dessinée, artiste et performeur inconnu. On tombe parfois sur des histoires qui viennent se loger en nous, et pour Carmela, c’est celle d’Etienne Mériaux, plasticien dont elle découvre par hasard une unique bande dessinée qui lui plaît et l’intrigue. Elle se lance sur les traces de cet auteur pour découvrir une vie brusquement arrêtée mais tire tous les fils laissés apparents pour essayer de circonscrire un portrait aussi dense que possible de cette énigme humaine. Au final, est-ce que ce n’est pas un besoin de combler des trous dans sa propre histoire qui justifie cette enquête au long cours ? Peut-être, mais pour ça il faut lire le texte.
- On écoute quoi aujourd’hui ?
Un peu de douceur pour commencer la semaine. J’écoute cette chanson en boucle depuis quelques jours.
- Je continue, pour les non initiés de la culture de l’internète, à vous donner des refs parfois un peu obscure. Le chaotic neutral (chaotique neutre) est une référence à un système de valeur de personnages dans Donjons et Dragons étendu à absolument tout. On en trouve un sacré paquet de memes sur le web, je vous laisse chercher au besoin. ↩︎
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