
Les heures décalées ont réveillé les petits oiseaux rieurs en moi. Je vis chaque soirée étirée avec d’aigus pépiements de joie, le soleil éclaboussé sur les murs de l’appartement, la vie qui se délie un peu, le temps plus lent. Dans les espaces entre mes côtes se digère la vie d’avant, la vie minuscule des années à se tancer, à se jauger, à se blesser un peu. A chaque respiration j’étends ma possibilité d’être au monde. Je cours je vole, je suis partout, je dis oui et je note, l’agenda se remplit, je dois cocher des soirées « repos » pour m’enjoindre à la paresse. Et parfois, je chipe quelques heures loin de tout, le nez au soleil, sur le balcon. C’est dimanche et aujourd’hui on a été à la mer se mêler aux gens, se mêler aux mouettes, prendre notre part de jour. Tout n’est pas encore simple mais j’apprends à laisser la bride souple, à chercher l’endroit en suspens pour m’y blottir. Il y a l’attente de ce qui, peut-être, se niche actuellement dans mes plis, il y a le soleil revenu, le corps à soigner, à comprendre, à écouter, les projets les vacances les rendez-vous le silence. Mais surtout l’indulgence, la grosse main chaude qui soutient la nuque, qui apaise. C’est dimanche, le soleil s’est enfui derrière les immeubles, je n’ai rien à faire que me fier à l’envie dans mon ventre, à mes yeux qui papillonnent, à ce rythme qui me meut sans que je lui impose ma rigidité. J’apprends la souplesse, j’apprends l’agilité émotionnelle, la sérénité ductile jusqu’à la tombée de la nuit. C’est un laborieux ouvrage, de laisser glisser en soi des courants où nos doigts n’ont pas de prise, d’être la rivière tout autant que les rives. C’est dimanche et je laisse mes cartographies de ravine s’écrire sans moi, je m’affranchis du temps, je laisse le jour tomber sur mes paupières.
Laisser un commentaire